dimanche 26 janvier 2014

7. parole d'albin


Ne pas jeter garder le jour ce qu’on aurait écrit la nuit parce qu’on le trouverait bon, pas bon, vrai, juste ou bidon, ne pas trier ne pas choisir, découvrir le matin ce qu’un autre la veille a écrit sur un bureau qui ressemble au sien avec un Meisterstück qu’on dirait, on n'en dirait rien, n’y comprendrait que couic ou tout autre chose que celui qui l’avait écrit hier cherchait à exprimer en vain et ne comprendrait pas lui-même aujourd’hui, qu’est-ce que ça peut bien faire, faut que ça sorte, que ça fuse que ça gerbe, et précisons, quand Albin parle ici de comprendre il veut dire ressentir, être ému, étonné, tourmenté, choqué, perturbé, toutes ces choses qui passent par le cœur, la cervelle et les tripes, les abats en général, ne pas jeter garder ne pas choisir, garder soit en même temps jeter, garder les mots pour mieux les jeter, oui mais lesquels ? ceux qui trouent le plafond, le plancher, l’air et le temps, le cul, le corps entier, il en a fait sa règle, Albin, il en a fait sa règle, manière de parler, d’abord tous ses mots trouent, sans exception, les mots dézinguent, tous, les mots réduisent les choses à ce qu’elles sont, rien du tout, anéantissent plus que Ravachol ou Bonnot, mordent et déchirent, froissent les dentelles, défrisent le drapé, déplissent la pierre, déroulent le point, annulent la fin, malmènent le début, le monde et son ordre, libèrent, emprisonnent dès qu’ils libèrent et libèrent dès qu’ils emprisonnent et puis surtout, il n’a fait sienne aucune règle ou quoi que ce soit, Albin troué, vu qu’il abandonne, vu qu’il oublie, Albin gruyère, sa langue et sa cervelle criblées font plaisir à voir, oublie tout sauf qu’il est terrassier et qu’il faut que ça circule ? même pas, ça non plus ne s’en souvient pas, à quoi bon ! ça vient tout seul, comme l’escargot bave Albin creuse, Albin pioche comme il chie, ouvre sa bouche à tous les vents, garde et jette  les mots, tous les mots que sa bouche sa main lâchent, tracent, expulsent, jette et garde les mots, ces mots qui le traversent, garde au loin tous les mots qui par son vide passent.

2 commentaires:

  1. C'est un détail pais c"'est dans l'Emmental qu'il y a des trous, pas dans le Gruyère !

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  2. des fois on sait pas quoi tellement les mots, on ne sait pas si quelqu'un pourrait les mieux dire ainsi et depuis Noël, vais-je dans la maison sur mon vélo d'appartement quoi de plus con qu'un vélo d'appartement bientôt on aura une voiture d'appartement et une plante aussi, vu qu'on a déjà le chien, le chien qui vieillit et qui aime de moins en moins sortir, le lui reprocherait-on avec tout cette eau qui tombe du ciel, le chien, le vélo le vrai remisé jusqu'à des temps plus disons adaptés quoique Thouars requiert le mollet plus que fait,en béton, pas cent mètres de plat et vas-y que ça monte, descend, remonte même la promenade du chien, celle qu'on appelle "aux canards" demande du souffle, des canards qui a six heures du matin ont déjà l'oeil ouvert et vas-y qu'ils se jettent faut voir comment sur les restes de pain, j'ai remarqué ce matin le cygne avec ses deux bébés, longtemps le mâle fut veuf, sa belle s'étant, on comprendra si l'on peut, on me l'a racontée et je savais même pas qu'un cygne volait, écrasée en plein vol sur les poutrelles du pont de Saint-Jacques, tout ça pour revenir au vélo d'appartement mais avec des cygnes c'est plus élégant et mon occupation nouvelle, regarder des vidéos sur youtube, Jacky me dit quand on aura des sous on fera installer une télé dans la pièce puisse le bon dieu nous garder fauchés, soit des vidéos sur youtube avec hier ce moment de grâce dans les femmes savantes, Denise Gence, "chimères vraiment, chimères dites-vous, je ne savais pas que j'eusse des chimères" je me souviens que pour ces chimères là, j'avais vu autant de femmes savantes qu'il avait été possible d'en voir parce que Denise Gence, je crois n'avoir jamais écouté vu entendu rôle mieux ressenti, "chimères, vraiment, je me réjouis fort de chimères" jusqu'à ce matin parce qu'on a beau pédaler toujours sur le même tapis faut bien changer d'horizon et je me mets des "femmes savantes" de plus récente saison avec, montre sacré tout pareil, Catherine Samie, ses "chimères" à elle, on peut pas dire, sa voix, sa respiration et ses yeux, à ses "chimères" cependant toujours me répondent le souffle, la retenue de Denise Gence, comme si le rôle enfin n'était plus un rôle mais que Denise Gence devenait chimère, "oh mon frère", t'as raison, Albin, les mots, on en avale, on en lit, on en ingurgite, on en survole mais pour ces "chimères-ci", vrai, Albin, seulement, je me damnerais.

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