vendredi 12 septembre 2014

10. tiré à part : à propos d'une Révolution...

140², ou La Révolution en 140 tweets, de Marc-Émile Thinez, Éditions Louise Bottu 2014

Au détour d’un tweet, Jean Thinez écrit « le point de départ n’est pas l’origine ». Il n’y a pas d’origine. Seulement des points de départ, arbitraires dans l’étendue sans fin ni commencement du mystère. Ni le monde ni la course à pied n’y échappent.

Ainsi, la Révolution a pu être pensée comme une sorte de big-bang qui aurait pour fonction de régénérer périodiquement le monde. Enfin, le petit monde. Celui des arrivistes et des rêveurs, des naïfs, des cyniques, petit monde frelaté de Peppone et Don Camillo, notre société, cette petite flaque dans l’immensité.
En ce sens, rien n’est plus révolutionnaire que la course à pied qui consiste à tourner en rond et en vain. L’aphorisme, que Marc-Émile Thinez appelle ici tweet, est cet éclair qui, un instant, semble venir trouer la monotonie, en réalité participe du même, un même réduit à l’éternel chaos.

Le point de départ ici quel est-il donc ? La course à pied, comme l’affirme Marc-Émile Thinez, ou bien l’Homme archaïque, ce « personnage » du Mythe de l’Éternel retour de Mircea Éliade, ou encore Jean Thinez, père mythique ?… Qu’importe ! le point de départ est partout et nulle part à la fois. Le point de départ est dans la convention, l’arbitraire d’un langage dont on ne sait où la logique peut nous mener.

140², ou La Révolution en 140 tweets, est du côté de cet inconnu. Marc-Émile Thinez, combien d’aphorismes ? pourrait-on demander en paraphrasant Staline (« Le Pape, combien de divisions ? »). Les tweets en vérité ne sont pas 140, mais 200, si j’ai bien compté. Un peu moins, en quantité, que les 240, je crois, de Debord dans La Société du spectacle, beaucoup moins pour ce qui est du sens : Marc-Émile Thinez ne prétend pas nous révéler la vérité du monde, même si de temps à autres il dérape des mots vers les idées, soit du concret vers l’illusion.

Mais tout cela n'est qu'un roman, nous dit-on. L’histoire d’un fils en mal d’un père en mal de Révolution. L’histoire de l’angoisse d’être au monde. Toujours la même rengaine…
Quand la ritournelle est belle, on ne se lasse pas de l’entendre et de la fredonner.